Profitons du beau temps

Il me restait à placer la barre franche qui est un lamellé-collé de toutes les essences de bois que l'on retrouve dans le bateau, acajou, pin du Nord, Iroko. Le système est très simple et solide. C'est ce que j'apprécie dans cette conception de voilier. Du simple, fonctionnel et du solide.
Les cadènes de pataras ont été finalement boulonnées à travers le tableau arrière. Pas facile. En plus du tableau, il y a des contre-plaques en acajou de 40 mm d'épaisseur. La difficulté est au niveau (eh oui, toujours la même rengaine) des conversions métriques et ici en pouces! 12,4 mm c'est plus du 1/2 pouce que du 7/8 . C'est comme cela. Alors il faut repercer les trous à 1/2. Et quand les boulons ont été bloqués dans la cadène lors de la première tentative, c'est en tapant au marteau sur le manche de la clef, et millimètre par millimètre, de sortir ce foutu boulon. C'est la première fois de ma vie que j'ai eu des crampes au niveau du bras et des doigts. Ils se recroquevillaient tout seul. J'avais beau les mettre droit avec l'autre main, rien à faire, ils revenaient dans une pitoyable position. Drôle de sensation! Mais c'est fait. Quelle fin de semaine!





Pourquoi construire un voilier ? Début d'une réflexion

Au départ, il y a un rêve ou un appel, de vivre inconfortablement, à l'étroit, dans un univers instable. Le pourquoi? je pense que chacun a sa propre vision. Pour acheter un voilier de 35 pieds, si l'on veut l'avoir à soi et non voguer sur un bateau qui appartient à une banque, il faut être suffisamment bien nanti pour payer cash le coût de ce rêve (environ 350 000$) avec l'équipement, voiles, etc. L'achat d'occasion comporte de grands risques. J'ai côtoyé quelques rénovateurs qui vont de mauvaises surprises en mauvaises surprises et qui en fin de compte, font de la rénovation pendant plus de 10 années, sans avoir terminé, et c'est dur pour le moral.
Nous avons mis 7 années pour la construction. Le choix du matériau, des plans, une affaire purement personnelle. Certains vont opter pour l'acier, l'aluminium. À chacun sa douce folie. Avec le recul, le choix du contre-plaqué, pour une construction amateur, reste une option réalisable et je referais ce choix. De plus, à réparer, relativement facile, un peu partout sur la planète.
Au départ, j'ai une formation de pianiste, classique, allant de concerts en concerts. Cette formation ou plutôt déformation nous rend persévérant, mais surtout solitaire. De passer des 8 heures par jour, seul devant son piano, de voyager seul, et ce pendant des années, vous fait passer comme un ours au fond de sa tanière! et lorsque vous construisez, vous êtes confrontés aux mêmes questions, comme face à une nouvelle oeuvre musicale qu'il faut s'approprier. Car vous serez encouragé, des Lâche pas, à la pelle, mais la réussite ou l'échec, c'est vous seul qui les portez.
Question budget, en 7 années, tout inclus, 1300$ par mètre. Alors fois 10,60 m....
Maintenant Baladin II est réellement comme une personne, de la difficulté à le quitter, même pour une semaine, de penser à lui comme on pense à une personne, comment est-il, comment se sent-il? La relation est intime, profonde. Peut-être ridicule de l'extérieur, mais c'est ce que je ressens. Et c'est vrai que l'on se prend la tête, continuellement, comme nos enfants. Parent un jour, parent toujours.
À suivre....

Il faut rêver, même si la réalité est dépourvue de rêves.

Nous rêvions ou plutôt espérions voguer, du moins au moteur pour amener Baladin II aux États-Unis. De l'eau, oui nous en avons devant les yeux, du vent, un peu, d'autres bateaux, oui quelques uns! sauf que cela se passe dans un chantier naval, la voie maritime juste devant nous, à 50m à peine. Et de rencontrer d'autres capitaines, qui voyaient leur bateau dans les airs, soutenu par les sangles du travel-lift, juste avant la mise à l'eau... Ah! un-tel est déjà parti.... Des travaux, encore de la finition. La consolation, tout le monde le trouve beau, c'est vrai qu'il est beau. Un voisin qui prépare son bateau pour la cinquième traversée en parle comme d'une oeuvre d'art. Mais je ne veux pas une oeuvre d'art que l'on met sous-verre. Je veux qu'il touche l'eau. Il ne manque que l'échappement moteur et les manettes de gaz avec les câbles et toujours en attente des pièces pour faire tenir la barre sur le safran. Déjà plus de 2 mois pour les avoir. C'est loooong! Alors on se console. C'est vrai qu'il est beau notre Baladin II